MUIR, JOHN, maître charbonnier, fermier, ouvrier de scierie et homme politique, né le 28 mai 1799 dans l’Ayrshire (maintenant partie de la région de Strathclyde, Écosse) ; il épousa Annie Miller, et ils eurent cinq enfants ; décédé le 4 avril 1883 à Sooke, Colombie-Britannique.
Maître charbonnier dans l’Ayrshire, John Muir vivait à Manchester lorsque la Hudson’s Bay Company l’embaucha en novembre 1848 pour aller travailler à ses mines de charbon dans l’Île-de-Vancouver. On avait découvert en 1835 des dépôts de charbon à ciel ouvert dans la région du fort Rupert (près de ce qui est aujourd’hui Port Hardy), mais on n’avait presque rien fait pour les exploiter. Cependant, en 1848, la marine royale et la Pacific Mail Steamship Company négociaient avec la Hudson’s Bay Company l’achat de charbon pour leurs bateaux à vapeur et, comme les employés de la région ne connaissaient pas l’exploitation de la houille, la Hudson’s Bay Company avait dû recruter de l’aide en Grande-Bretagne.
Moins de trois semaines après avoir signé un contrat de trois ans comme contremaître, Muir conduisit sa femme, leurs quatre fils, leur fille veuve et ses deux jeunes enfants ainsi que deux neveux à Gravesend, Angleterre, où le groupe s’embarqua sur le trois-mâts barque Harpooner. Perspicace, Muir s’était procuré des contrats de mineurs pour ses fils, dont l’un n’avait que neuf ans, et pour ses neveux. Le groupe atteignit le fort Victoria (Victoria) dans l’Île-de-Vancouver en juin 1849. Après un bref séjour à cet endroit, ils firent voile à bord du brick Mary Dare de la Hudson’s Bay Company à destination du fort Rupert où ils arrivèrent le 24 septembre.
Après avoir inspecté le bassin minier de Suquash, Muir constata qu’on trouvait du charbon surtout sur la plage du havre Beaver où les Indiens de la région en avaient entassé près de l’eau une petite réserve qu’ils avaient ramassée à la main. Muir savait que ce charbon contenait beaucoup de sel et qu’on ne pouvait de toute évidence en faire de grandes provisions ; il commença donc à creuser à l’intérieur des terres. Ne pouvant compter que sur quelques mineurs et ne disposant pas de machines, ni d’animaux ni de gros appareils, Muir progressa lentement. La construction du fort Rupert n’était pas encore terminée, et les objets de fer se faisaient particulièrement rares. Tous les travaux s’effectuaient à la main et, en conséquence, les mineurs ne purent littéralement que gratter la surface. Ces moyens primitifs et le peu de valeur des gisements de charbon du bassin de Suquash devaient finalement entraîner la faillite de l’entreprise. Le 26 janvier 1850, Muir déclara toutefois à Eden Colvile*, gouverneur de Rupert’s Land, que, même s’il n’avait pas encore découvert un bon filon après avoir creusé jusqu’à 41 pieds et 6 pouces de profondeur, il gardait bon espoir d’en trouver un.
Jusqu’à ce moment, Muir avait agi simplement comme chef de son petit groupe et dominé sa famille et ses opinions. Bien qu’il ait fait part de ses préoccupations concernant la qualité de la nourriture et demandé à Colville plus de victuailles fraîches, il ne déposa aucune plainte à propos de la discipline au fort, du piètre matériel, ni du harcèlement des Amérindiens, tous des problèmes qui commençaient à inquiéter sa famille. En outre, il était aux prises avec les revendications répétées de ses subordonnés exigeant la suppression des tâches à la surface de la mine. Selon leur interprétation de leurs contrats, leur travail se limitait aux tâches spécialisées dans le puits de la mine pour lesquelles ils avaient été formés ; le travail à la surface, estimaient-ils, comme le drainage, le déblaiement, le charriage et la consolidation du puits, incombait à la compagnie, obligation dont elle s’acquittait rarement.
Au printemps de 1850, les relations entre les mineurs et les employés de la Hudson’s Bay Company du fort Rupert s’étaient sérieusement détériorées. Une succession d’incidents entraînèrent l’arrestation et la mise aux fers du fils de Muir, Andrew*, et de son neveu, John McGregor. Ces hommes avaient refusé de travailler comme journaliers, et cette provocation avait obligé George Blenkinsop*, fonctionnaire principal du fort, à prendre une telle mesure. Il les fit relâcher six jours plus tard, espérant que l’emprisonnement leur aurait redonné le sens de la discipline. Il n’en fut rien car, le 2 juillet, les deux hommes entraînèrent tous les mineurs, sauf Muir, à déserter la mine et à se rendre en Californie. Le gouvernement et les fonctionnaires de la Hudson’s Bay Company firent une enquête, et Blenkinsop fut blâmé. Entre-temps, Muir refusa de travailler seul.
Muir quitta la compagnie à l’expiration de son contrat, vers la fin de 1851, et alla s’installer à Sooke dans une ferme qui avait appartenu à Walter Colquhoun Grant*. Il fut bientôt rejoint par son fils Andrew et son neveu Archibald Muir à leur retour de San Francisco. Les trois hommes étaient devenus des artisans aptes à exercer de nombreux métiers ; ils se mirent à faire des poteaux et des pieux, et à équarrir du bois. Toutefois, en 1852, James Douglas*, gouverneur de l’Île-de-Vancouver et agent principal de la Hudson’s Bay Company, invita Muir à devenir contremaître au bassin houiller de la compagnie récemment ouvert à Nanaimo. Il était entendu que Muir aurait pleins pouvoirs en matière d’exploitation de la mine. Il accepta et signa un contrat de deux ans qu’il remplit consciencieusement. En 1854, Boyd Gilmour, un autre maître charbonnier de l’Ayrshire, le remplaça et Muir se retira sur ses terres, maintenant plus grandes, de Sooke. Il consacra ses énergies à la ferme Woodside.
En 1855, les Muir acquirent les machines et les chaudières d’un bateau à vapeur naufragé, ce qui leur permit de construire la première scierie à vapeur de l’île. En 1859, la Muir and Company exportait, à partir de son débarcadère, 40 000 pieds de planches et, en 1860, elle ouvrait une cour à bois à Victoria. Attirés par la ruée vers l’or à la rivière Leech, située non loin de là, les Muir vendirent leurs intérêts dans l’exploitation forestière en 1864. Curieusement, la famille Muir se mit à chercher du charbon et non de l’or dans cette région. Ne trouvant rien, elle racheta sa propre scierie en 1867. Avec son dynamisme habituel, la famille augmenta la production et les ventes. La compagnie cessa son activité en 1892, neuf ans après la mort de Muir.
John Muir avait démontré en partie qu’il était sage d’embaucher des mineurs expérimentés dans une industrie houillère embryonnaire. Avec sa parenté, il colonisa une région relativement isolée en exploitant les forêts et les champs de Sooke. Du fait qu’elle trouva des débouchés sur les marchés locaux et étrangers pour son bois, cette famille contribua largement à l’économie de la région. Elle eut aussi un sens aigu de son devoir envers la société. En 1854, Muir avait accepté un poste de juge de paix et il fut élu représentant du district de Sooke à la première Assemblée de l’Île-de-Vancouver de 1856 à 1861. De 1862 à 1866, il siégea au Conseil législatif, bien qu’il pût difficilement assister aux réunions. Son fils Andrew devint le premier shérif de l’Île-de-Vancouver. Il y a peu de pionniers qui aient fait autant pour l’île que John Muir ; sa famille nombreuse et unie y fonda l’une des premières entreprises prospères de type familial. Les Muir ont fourni le premier exemple d’un genre d’entreprise qui devint courant dans le monde des affaires de l’île à la fin du xixe siècle.
PABC, Fort Nanaimo corr., août 1852–sept. 1853 (transcription) ; Andrew Muir, Diary, 9 nov. 1848–5 août 1850 ; Vert. file, Muir family ; John Muir.— HBRS, XIX (Rich et A. M. Johnson).— Daily British Colonist, 4 avril 1883.— B. M. Gough, The Royal Navy and the northwest coast of North America, 1810–1914 : a study of British maritime ascendancy (Vancouver, 1971), 98–101.— Rich, Hist. of HBC, II : 644.— P. M. Johnson, « Fort Rupert », Beaver, outfit 302 (printemps 1972) : 4–15.— J. H. Kemble, « Coal from the northwest coast, 1848–1850 », BCHQ, 2 (1938) : 123–130.— W. K. Lamb, « Early lumbering on Vancouver Island, part ii, 1856–66 », BCHQ, 2 (1938) : 95–121.— B. A. McKelvie, « The founding of Nanaimo », BCHQ, 8 (1944) : 169–188.
Daniel T. Gallacher, « MUIR, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/muir_john_11F.html.
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Auteur de l'article: | Daniel T. Gallacher |
Titre de l'article: | MUIR, JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |