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CHIPMAN, ELIZA ANN (Chipman), auteure et éducatrice, née le 3 juillet 1807 dans le canton de Cornwallis, Nouvelle-Écosse, fille de Holmes Chipman et d’Elizabeth Andrews ; décédée le 23 octobre 1853 à Pleasant Valley (Berwick North, Nouvelle-Écosse).

Le premier événement marquant de la vie d’Eliza Ann Chipman se produisit quand elle « fit l’expérience [...] d’une profonde conversion », à l’âge de 16 ans. À la suite de sa profession de foi, elle fut baptisée le 6 juin 1824 par son pasteur, l’influent Edward Manning, et acceptée comme membre de la congrégation baptiste First Cornwallis. Le 24 mai 1827, à l’âge de 19 ans, après s’être longuement interrogée, elle épousa son cousin William Chipman à l’église First Cornwallis. Âgé de 46 ans, ce marchand et fermier prospère, conseiller presbytéral important de la congrégation baptiste, était veuf et père de huit enfants dont deux étaient plus vieux qu’Eliza Ann. En dépit de ces obstacles, ce fut un mariage stable où les deux époux s’appuyèrent mutuellement. En plus d’avoir à s’occuper des enfants du premier mariage de son mari, la jeune femme devait avoir 12 enfants dont 8 atteignirent l’âge adulte. Un an après leur mariage, William Chipman décida de devenir ministre et, en 1829, Eliza Ann et sa famille, y compris son premier bébé, étaient déjà établis à Pleasant Valley où William fut installé comme premier pasteur de la congrégation baptiste Second Cornwallis. Comme c’était une congrégation nouvelle et relativement petite, la famille Chipman dut défricher une terre et établir une ferme afin de subvenir à ses besoins croissants, sans échapper à toutes les épreuves physiques et financières qui accompagnaient cette tâche. Mme Chipman vécut les 24 dernières années de sa vie dans le presbytère de Pleasant Valley où elle mourut à l’âge de 46 ans des suites de graves troubles intestinaux, trois ans après la naissance de son dernier enfant.

Le 20 juillet 1823, à l’âge de 16 ans, Eliza Ann avait commencé un journal spirituel, probablement à l’instigation de Manning ; elle y écrivit pour la dernière fois le 6 août 1853, moins de trois mois avant sa mort. Espérant que la lecture de ce journal serait profitable à ses amis et à son mari, elle en révéla l’existence à ce dernier trois jours avant de mourir. En janvier 1855, conformément au désir de sa femme, Chipman publia Memoir of the life of Mrs. Eliza Ann Chipman, wife of the Rev. William Chipman, of Pleasant Valley, Cornwallis.

Bien qu’elle n’ait jamais voyagé hors de la partie ouest de la Nouvelle-Écosse où elle était née, Mme Chipman montra une largeur de vues sur les plans spirituel et intellectuel qui ne correspondait pas à sa situation favorisant plutôt l’esprit de clocher. Dans son journal, où elle exprime sa foi dans des termes propres à son époque, elle s’intéresse essentiellement à l’introspection spirituelle, tout en faisant preuve d’honnêteté dans cet examen de conscience et d’un esprit pénétrant, attiré par les lettres. Manning avait écrit d’Eliza Ann, quand elle était encore adolescente, qu’elle possédait « des capacités intellectuelles fort prometteuses ». Sa grande priorité était de s’efforcer de vivre à la manière du Christ mais, après son mariage, son souci pour les siens la força à sacrifier bon nombre de ses aspirations spirituelles, ce qui créa une tension constante dans sa vie. Cependant, loin de ne devenir qu’un prolongement de son mari et de sa famille, Mme Chipman garda une forte personnalité. Son profond engagement dans sa congrégation et dans son milieu reposait sur des convictions personnelles : en plus de s’occuper de sa nombreuse famille, elle organisa et dirigea des groupes de prières formés de femmes, enseigna à l’école du dimanche, accueillit chaleureusement les ministres en tournée, créa un externat dans sa propre maison et devint une seconde mère pour les élèves solitaires de la Horton Academy et de l’Acadia College de Wolfville. En même temps, elle fit face à 12 grossesses, à plusieurs maladies graves qui affectèrent son ouïe et aux absences prolongées de son mari qui devait faire des tournées de prédication. Il n’est guère étonnant qu’elle ait confié en secret à son journal : « Mon corps est si épuisé par la fatigue et par les soucis que je n’ai pas le temps de me reposer ni de lire. »

L’un des plus grands intérêts de Mme Chipman fut l’éducation, à la fois laïque et religieuse, et elle eut beaucoup d’influence dans ce domaine. Elle et son mari apportèrent leur soutien aux institutions d’éducation baptistes, notamment la Horton Academy et l’Acadia Collège où elle envoya ses propres enfants. Son beau-fils Isaac Logan Chipman devint l’un des premiers professeurs d’Acadia College et sa bru Alice Theodosia Shaw fut une pionnière de l’éducation des femmes au Grand Pre Seminary de Wolfville. Avec une personne de l’envergure de Mme Chipman pour assurer une direction aux jeunes femmes de la communauté et leur servir de modèle, il n’est pas surprenant que sa confession ait joué un rôle si important dans l’éducation féminine.

Eliza Ann Chipman a retenu l’attention surtout à cause de la publication posthume de son journal, qui couvrait en fait toute sa vie adulte. L’étude de cette vie révèle que non seulement elle laissa le portrait littéraire intime d’une Néo-Écossaise du xixe siècle, mais qu’elle exerça aussi une influence discrète, quoique décisive, sur le développement social et intellectuel de sa province natale.

Carol Anne Janzen

Le journal d’Eliza Ann Chipman fut publié sous le titre de Memoir of the life of Mrs. Eliza Ann Chipman, wife of the Rev. William Chipman, of Pleasant Valley, Cornwallis (Halifax, 1855). Trois exemplaires sont conservés aux ABHC ; une lettre originale de George Armstrong à Mme Chipman, datée du 26 janv. 1839, est collée sur le plat supérieur de l’exemplaire 1. Deux éléments de Memoir paraissent dans Pioneer and gentlewomen of British North America, 1713–1867, Beth Light et Alison Prentice, édit. (Toronto, 1980), 60–61.

ABHC, William Chipman, day-book, 1837–1857 ; Edward Manning, journals, 1812–1845 ; D. O. Parker, « Berwick, its peuple and institutions as I knew them about sixty years ago » (album de coupures des articles de Parker dans le Register (Berwick, N.-É.), 1897).— Bill, Fifty years with Baptist ministers.— J. D. Davison, Eliza of Pleasant Valley : her family, church, and community in nineteenth century Cornwallis Township, Kings County, Nova Scotia (Wolfville, N.-É., [1983]).

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Carol Anne Janzen, « CHIPMAN, ELIZA ANN (Chipman) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 9 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/chipman_eliza_ann_8F.html.

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Auteur de l'article:    Carol Anne Janzen
Titre de l'article:    CHIPMAN, ELIZA ANN (Chipman)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    1985
Date de consultation:    9 oct. 2024